Le Nobel de la paix pour faire la guerre

35.000 soldats américains supplémentaires seront envoyés faire la guerre en Afghanistan. La décision a été prise mercredi dernier par le président Obama. Il se trouve que ce même président américain, Barack Obama, s’était vu attribuer, il y a un peu plus d’un mois, le 9 octobre dernier pour être plus précis, le prix Nobel de la paix. A son corps défendant, Obama s’était déclaré «surpris» en apprenant avoir été choisi pour cette distinction qui se veut la plus importante au monde. Il a également rappelé qu’il était aussi «le commandant en chef de l’armée américaine». Alors de quelle paix s’agit-il? On le sent bien, Obama est plus indisposé de recevoir ce prix que ne le sont ceux qui le lui ont attribué. Que reste-t-il à comprendre du sens et de la portée d’une telle «distinction»? Depuis Kissinger en 1973 pour «sa guerre au Vietnam» jusqu’à Al Gore en 2007 pour son agitation autour du «changement climatique» qui divise encore les scientifiques en passant par les signataires de l’accord de «Camp David» (Menahem Begin- Anouar El Sadate) en 1978 dont on peut dire, 31 ans plus tard, qu’il n’a existé que pour mieux reporter la paix entre Israéliens et Palestiniens. Et on en passe. Pour aller à l’essentiel, disons que toutes les distinctions qui «circulent» à travers le monde ne sont rien d’autre que des «ordres de mission». Prenons la dernière polémique en France autour du prix littéraire Goncourt. Une Française ayant des origines sénégalaises se voit attribuer le prix cette année. Mal lui en prit de déclarer juste après, qu’elle avait quitté la France «à cause de Sarkozy…Je trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité,…je trouve cette France-là monstrueuse», pour s’établir en Allemagne où elle considère que l’atmosphère est plus respirable. Mal lui en prit car aussitôt, un homme politique français zélé et très médiatisé la rappelle à «l’ordre» et «au nécessaire droit de réserve» auquel sont soumis tous les récipiendaires du prix Goncourt. Un petit vacarme s’en est suivi pour «réfuter ce droit de réserve» mais qui devait en réalité plus servir à redonner une certaine crédibilité à ces distinctions menacées de démystification. Peine perdue car ils resteront de beaux bracelets électroniques comme ceux des prisonniers qu’on garde bien en vue. Cela ne date pas d’aujourd’hui. En Algérie, nous en avons des exemples. Comme nos malheureux concitoyens qui ont été embarqués pour le front par la France coloniale lors de la Première et de la Seconde guerre mondiale. Ceux qui n’y ont pas laissé leur vie, sont revenus pour la plupart avec un membre en moins et autres handicaps à vie. Comme lot de consolation, la poitrine bardée de distinctions de pacotille. Une «quincaillerie» qui n’a pas empêché la France de leur accorder une pension de guerre de misère bien différente de celle de leurs compagnons d’armes français. Ils sont morts comme le fameux «colonel Bendaoud» qui devait rester «arabe malgré son grade».
Cela se passait au siècle dernier. Malheureusement, la pratique et les «volontaires» existent toujours aujourd’hui. Les prix, distinctions et autres médailles sont décernés non plus à des analphabètes mais à des intellectuels ou supposés comme tels. Ces derniers assimilent la méthode à une consécration de leur «génie». Ce qui, en apparence, mais en apparence seulement, leur réussit pour autant qu’ils ne sortent pas du «maillage» dans lequel ils sont aussitôt confinés. Malheur à ceux qui se hasarderaient à s’en écarter! Les exemples ne manquent pas. Nous ne citerons que le regretté Mouloud Feraoun qui a obtenu «le Grand Prix de la Ville d’Alger» pour son roman Le Fils du pauvre. Pour son autre roman La Terre et le sang, il obtint le «Prix du Roman populiste» après Jules Romain, Jean-Paul Sartre, Emmanuel Roblès pour ne citer que ceux-là. Il était en contact avec Albert Camus. Pourtant et pour s’être trop impliqué dans l’éducation et la scolarisation des enfants «indigènes», Mouloud Feraoun est assassiné par l’OAS en 1962. Aujourd’hui on parle encore d’Albert Camus, de Sartre, mais qui évoque Feraoun de l’autre côté de la Méditerranée? Ou encore Mohamed Dib, Rachid Mimouni? Ils avaient pourtant la cote à un certain moment en Occident. Il n’est point besoin d’être un «génie» pour comprendre.(L’Expression-03.12.09.)
******** Le pari risqué de Obama
 

L’annonce de l’envoi de 30.000 soldats américains supplémentaires en Afghanistan était attendue et ne constituait pas en soi une surprise. Avec ce renfort, qui s’ajoute aux 71.000 soldats présents sur place, les forces armées américaines vont atteindre le chiffre de 100.000 hommes mobilisés sur le terrain. Toutefois, sera-t-il suffisant pour venir à bout de l’insurrection taliban? Rien de moins sûr en fait et d’aucuns craignent plutôt un enlisement de la guerre. De fait, Barack Obama avait, certes, dès sa prise de pouvoir, mis au coeur de ses préoccupations l’Afghanistan lequel est, selon lui, plus prégnant pour la sécurité des Etats-Unis que ne l’est l’Irak, axant ainsi tous ses efforts à apporter toute l’aide requise à l’armée engagée dans le combat et à lui donner une couverture optimum de ses besoins, lui permettant de mener à terme sa mission. Laquelle mission consiste à éradiquer l’insurrection taliban. Pour ce faire, le président américain n’a pas lésiné sur les moyens, humains, matériels et financiers pour gagner la bataille d’Afghanistan. Depuis son arrivée à la Maison-Blanche, il a triplé l’effectif militaire US laissé par son prédécesseur en Afghanistan. Le pari engagé par Barack Obama, alors que l’opinion publique américaine est de plus en plus remontée contre cette guerre, est d’autant plus risqué qu’il est loin d’avoir partie gagnée. D’où l’incitation à la coalition internationale de faire un geste similaire à celui des Etats-Unis par l’envoi de renforts en Afghanistan. De fait, plusieurs paramètres entrent en ligne de compte dont le moindre est encore la désorganisation de l’Etat afghan et dont les autorités sont toujours incapables de prendre en charge une partie de la sécurité du pays. Et comme l’a souligné M.Obama lui-même, dans le discours de West Point, le succès de l’opération est «inextricablement» lié à un partenariat actif avec le Pakistan, outre l’apport militaire et financier international sous forme d’aide au développement de l’Afghanistan. Pays déstructuré par trente années de guerre, l’Etat en déshérence, l’armée et la police sous-équipées, corrompues et inefficaces, il est patent que l’Afghanistan ne garantit pas une sortie de guerre honorable. C’est effectivement la crainte de l’opinion américaine qui appréhende une réédition du bourbier vietnamien, en dépit des arguments de Obama évoquant «l’intérêt national vital» des Etats-Unis tout en écartant une telle répétition de l’histoire, qui défendait le bien-fondé de la politique axée sur la force mise en place en Afghanistan. Or, le risque d’enlisement est réel d’autant plus qu’il y a le précédent de l’armée soviétique humiliée et boutée hors d’Afghanistan en 1989. Le nombre de militaires opérant en Afghanistan – qui seront près de 150.000 (outre les 100.000 soldats américains, il y aura, d’ici la fin de l’année environ 50.000 soldats de la coalition internationale -Isaf-Otan-) -, ne garantit pas la victoire sur l’insurrection taliban, laquelle combat l’invasion étrangère depuis 2001. Or, en huit années de présence, les forces étrangères n’ont, relativement, sécurisé que la capitale afghane, Kaboul. Ce qui est peu par rapport aux forces gigantesques mises en branle. Et puis, il est un peu paradoxal que ce soit le Prix Nobel de la Paix, fraîchement investi, qui donne le «la» au renforcement du potentiel guerrier et militaire en Afghanistan. Dans ce pays, Barack Obama joue en fait un coup de poker, espérant une répétition de l’opération qui permit de briser l’insurrection en Irak et le retour progressif de la normalité dans ce pays. Certes! Mais les données irakiennes n’ont rien à voir avec l’Afghanistan où l’Etat a été absent pendant plus de trente ans. Par sa nouvelle stratégie, Obama joue en fait un jeu où la chance risque de ne pas toujours sourire aux plus audacieux. (L’Expression-03.12.09.)

****Un Président en Guerre….La politique entre la parole et la réalité.

«Que la République était belle sous l’Empire.»Alphonse Aulard En recevant le 10 décembre 2009 le prix Nobel de la Paix, le Président Obama a choisi, dans son allocution de récipiendaire, d’affronter la contestation qui a accueilli, un peu partout dans le monde, sa distinction.  Il lui est reproché de n’avoir encore rien prouvé de sa capacité d’oeuvrer à la paix ou pour le moins de s’engager résolument sur son chemin. Et sa récente décision de renforcer la présence américaine en Afghanistan par l’envoi de trente mille soldats supplémentaires a conforté ses détracteurs et fragilisé les positions de ses admirateurs. Le Président américain, désormais surnommé «Le Président en Guerre», a construit toute sa défense sur le rapport dialectique entre guerre et paix, prononçant au cours de son intervention quarante-cinq fois (45) le premier terme et trente fois (30) le second. Et sans reprendre la métaphore de l’axe du mal il ne dresse pas moins la scène d’un drame politique dans lequel il stigmatise la source du mal qui oblige le monde libre à recourir malgré lui à l’usage honni de la violence. Il s’indigne devant l’angoisse d’une telle situation et fait appel à une mémoire blessée qui ne doit s’autoriser aucune négligence devant une adversaire qui est déjà passé à l’acte. Et s’il reconnaît que la guerre est toujours horrible, il soutient qu’il existe, malheureusement, des guerres justes.

 En parfait ventriloque, il considère que toute menace de l’ordre mondial ne peut s’apparenter qu’à une entreprise malfaisante et doit renforcer la main qui doit l’arrêter. Ces propos auraient pu être tenus par Bush qui dès le 15 septembre 2001 avait annoncé: «la guerre a été déclarée à l’Amérique et nous répondrons en conséquence».

 Mais contrairement à une guerre classique, la riposte n’était pas envisagée contre une autre armée mais contre un réseau diffus ; la rhétorique des bons contre les méchants était désormais en marche. L’imprécision du concept le rend docile à tout usage opportuniste et l’extrême sensibilité des gens à la destructivité fait le reste. Obama peut alors conclure dans une logique apparente: «Les outils de guerre ont un rôle à jouer pour préserver la paix».

 On peut difficilement contenir sa déception quand on se rappelle l’immense espoir et l’enthousiasme enivrant provoqués par sa fraîcheur, sa nouveauté, par ses promesses «de guérir la nation», «de réparer le monde», de s’engager sur «la voie de lumière vers la liberté dans la plus ténébreuse des nuits». Par tout ce qu’autorisait le nouveau sésame «Yes We can». Mais en fait «nous» c’est qui ?

 Le concept de parole politique évoque immanquablement un rapport à la vérité dans l’opinion publique(1).

 Mais dans les faits la parole politique ne cherche pas à être vraie, elle cherche seulement à être crédible. «La véracité n’a jamais figuré au nombre des vertus politiques»(2). Elle n’est qu’une option pour le discours politique, si elle concourt à sa rentabilité. La séduction, il est évident, prime sur la conviction. Les promesses sont un moyen de briguer la faveur des autres et toute leur légitimité tient à la seule prétention de leur auteur. Avant l’épreuve des faits, les rapports politiques sont alors fondés sur une présomption de vertu, de compétence et de lucidité.

 Ainsi le message du Président Obama s’inscrit pleinement dans l’argumentation orientée telle que décrite par Philippe Breton et Serge Proulx dans leur ouvrage l’explosion de la communication:

 «Les techniques utilisées consistent à amplifier certains aspects et à en minimiser d’autres. Il s’agit ici de mettre en valeur les qualités d’un message ou d’un candidat, à prétendre par exemple avoir pris sous la contrainte une décision impopulaire, mais être l’instigateur de celle dont on peut tirer un bénéfice. L’information orientée n’est pas à proprement parler «menteuse», elle représente une promotion des dimensions du réel qui sont les plus favorables à l’émetteur du message»(3).

 Et si ces dimensions du réel étaient inconsciemment partagées par les destinataires du message ?

 Anatole France écrivait dans «La vie en fleurs»: «J’aime la vérité, je crois que l’humanité en a besoin ; mais elle a bien plus grand besoin encore du mensonge qui la flatte, la console, lui donne des espérances infinies ; sans le mensonge, elle périrait de désespoir et d’ennui»(4).

 Alors plus que promouvoir certaines dimensions du réel, les mots sont le moyen de quitter le domaine des choses réelles. La plasticité de la parole politique la rend capable de servir toutes les causes ; et la chimère est avant tout un être verbal. Mais le diseur de la parole politique en est-il l’auteur ? ou n’en est-il que le porteur ?

 La mission impériale de Etats-Unis ne tient pas et n’a jamais tenu à la personne d’un Président, aussi prestigieux fût-il. Et dans l’Empire du capital mondialisé(5) le langage du porte-parole ne peut être anomal. Des formules savamment balancées mais sans conséquence suffisent à réhabiliter sa marque.

 Dans un monde privatisé les valeurs affichées ont bien plus d’importance que la vérité des faits, les grands mots et les injonctions morales évitent la mise en place de dispositifs concrets pour atteindre les finalités humaines. Ce monde fait appel à l’émotion pour masquer toutes les richesses du possible.

 «Le mensonge et la crédulité s’accouplent et engendrent l’opinion»(6).

 Alors oui, nous pouvons… continuer à croire ; car les «faits ne pénètrent pas dans le monde où habitent les croyances»(6).(Le Quotidien d’Oran-17.12.09.) par Mohammed ABBOU

Notes :(1) Charaudeau, Patrick, Petit traité de politique à l’usage du citoyen, Vuibert, Paris, 2008.(2) Arendt, Hannah, La crise de la culture, Gallimard, Paris, 1972.

(3) Breton Philippe et Proulx Serge, L’explosion de la communication, Casbah, Alger, 2000.

(4) France Anatole, La vie en fleurs, www.horas.com

(5) Ziegler Jean, Les nouveaux maîtres du monde, Fayard, Paris, 2002

(6) Paul Valery,

www. paulvalery.fr 



4 commentaires

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